50 ans d’existence de Zaïko Langa Langa. Une vraie histoire d’amour avec ses nombreux mélomanes

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Zaïko Langa Langa, une histoire congolaise, pour célébrer en studio ses 50 ans d’existence, Zaïko Langa Langa perpétue à travers le double album Sève sa recette de la rumba congolaise qui lui vaut une popularité inégalable auprès de ses compatriotes. Retour sur l’histoire agitée de cette formation emblématique qui a accueilli en son sein de nombreux chanteurs et musiciens en 5 décennies.

Le degré d’exigence n’a pas baissé. Quand on s’appelle Zaïko Langa Langa, on a un rang à tenir et céder à la tentation de la facilité n’a jamais été vraiment le genre de la maison. L’album Sève, qui marque les cinquante ans d’activité du groupe, a été conçu dans cet état d’esprit, pour “confirmer” la place qu’il occupe dans la musique congolaise, comme l’explique son membre historique Jossart Nyoka Longo. “Zaïko a toujours été considéré comme la troisième école de la rumba congolaise, après celle du Grand Kallé, l’African Jazz qui a été prolongée par Tabu Ley Rochereau, et celle de Franco Luambo Makiadi, l’OK Jazz”, précise le sexagénaire, actuel président de la Société congolaise des droits d’auteur (Socoda).

Tout au long des quatorze morceaux, réunis sur ce double album, l’expérience s’entend déjà dans le son soigné, la qualité de la production bien au-dessus de la moyenne de ce qui vient ces derniers temps de RDC. En musique comme en cuisine, il n’est pas rare que ce soit dans les vieilles marmites qu’on fasse les meilleures soupes : pour l’enregistrement, le groupe est retourné dans des locaux qu’il connaît de longue date, ceux de l’ex-Voix du Zaïre, où étaient logées la radio et télé nationale au service du régime de Mobutu. Ils y avaient notamment donné en 1975 un concert au pied levé, puis un autre tout aussi mémorable en 1981 sur l’esplanade du bâtiment : le défilé des enfants venant récompenser les musiciens d’un billet illustre leur popularité d’alors.

“Quand nous sommes arrivés sur la scène musicale congolaise, nous avons innové en éliminant certains instruments comme les cuivres et en apportant beaucoup de choses : dans l’animation, avec ce qu’on appelle chez nous les atalaku, qui ont inspiré beaucoup de jeunes Africains comme DJ Arafat ; le beat de la caisse claire avec notre batteur Meridjo Belobi qui vient de nous quitter il y a quelques jours à Bruxelles – auparavant, quand Tabu Ley avait introduit la batterie dans la rumba, c’était beaucoup plus le beat du rhythm & blues de James Brown, de Wilson Picket”, résume Jossart Nyoka Longo.

Parmi les éléments caractéristiques sur la carte d’identité musicale du groupe, il y a aussi le tempo, celui des sébènes, ces parties instrumentales des chansons qui soudain accélèrent vers la transe, laissant la place aux motifs des guitares électriques. Très tôt, Zaïko Langa Langa est passé maître dans cet art-là, grâce au talent et à l’inventivité de son guitariste Manuaku Waku (alias Pepe Felly), longtemps son chef d’orchestre.

Débuts et succès

L’acte de naissance de Zaïko Langa Langa, le 24 décembre 1969, marque aussi l’irruption sur la scène locale d’une nouvelle génération soumise à d’autres influences extérieures, avec d’autres rêves, en rupture dans la forme comme le fond avec le style plus polissé des tauliers du genre.

Le nombre incalculable de 45 tours sortis durant les premières années de sa carrière laisse deviner quel était le retentissement du répertoire de l’orchestre auprès de la jeunesse zaïroise. Et même au-delà : dès 1975, il tourne au Togo et au Ghana, retrouvant sur son chemin le guitariste Henri Bowane, pionnier de la musique congolaise avec Wendo Kolosoy, qui se propose de jouer les intermédiaires afin que ses jeunes compatriotes enregistrent à Accra le 33 tours Plaisirs de l’Ouest.

Une décennie et une vingtaine d’albums plus tard, ils se produisent en Extrême-Orient. “Nous sommes heureux d’avoir transmis au peuple japonais à travers nos musiques et nos danses ce message d’authenticité zaïroise. Nous voulons être ce que nous sommes et non ce que les autres veulent que nous soyons. Car la culture, c’est l’identité d’un peuple”, écrit Jossart Nyoka Longo sur la pochette de l’irrésistible Nippon Banzaï, un des albums référence de rumba live.

Au même moment, Canal tropical, l’émission de RFI animée par Gilles Obringer qui a contribué à l’essor des musiques d’Afrique, proclame Zaïko “deuxième groupe afro-antillais, après Kassav'”, se souvient le chanteur congolais. Un projet aux Antilles avec Jacob Desvarieux est même dans les tuyaux. Les portes du succès international sont sur le point de s’ouvrir, aucun doute. Des contacts sont noués, des pourparlers s’engagent qui laissent entrevoir des lendemains à une autre échelle.

Relâchement et départs

Mais à ce moment crucial, la formation traverse sa pire crise, créant de l’aveu de son porte-parole un “relâchement” qui aura raison des discussions. Si les scissions et autres séparations à grand fracas pour des raisons artistiques ou d’ego sont monnaie courante dans la rumba, au point de faire partie du paysage, chez Zaïko, le phénomène récurrent a pris des proportions rares.

Un certain nombre de départs, comme celui du cofondateur Papa Wemba ou d’Evoloko, ont provoqué des ondes de choc limitées, gommées par le renouvellement permanent des effectifs. Ceux qui surviennent début 1988, juste après un concert de retrouvailles avec d’anciens membres, ont un impact qui dépasse la musique : des officiels du ministère des Arts et de la Culture tentent une médiation, “mais il n’y aura pas de réconciliation”, raconte le livre-somme Rumba on The River de Gary Stewart qui consacre plusieurs pages à ces épisodes dont les conséquences ne sont pas qu’anecdotiques.

L’universitaire et écrivain Manda Tchebwa a même dressé dans son ouvrage Terre de la chanson un arbre généalogique de Zaïko Langa Langa pour recenser tous ceux qui ont quitté le navire originel dans le but de monter leur propre formation. Quitte à emprunter un bout du nom afin de mieux souligner la filiation et créer in fine une confusion préjudiciable à tous : Grand Zaïko Wawa, Zaïko Langa Langa Familia Dei, Langa Langa Stars… Difficile de s’y retrouver !

Tel le phénix, le groupe est parvenu à renaître chaque fois sous l’égide de l’indéboulonnable Jossart Nyoka Longo, devenu depuis les années l’incarnation de cet orchestre, toujours très actif et apprécié à cette époque. “On n’a jamais métissé notre rumba”, assure-t-il, tout en concédant quelques pas timides et prudents vers les technologies actuelles. Faire figure d’institution de la musique congolaise est un statut qui crée des devoirs, que Zaïko Langa Langa assume pleinement.

La rédaction

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